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03.03.25

Le Conseil d’Etat et l’abandon de poste

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Le Conseil d’Etat et l’abandon de poste

CE, 18 décembre 2024, Association Le Cercle Lafay et autres, req. n°743640, concl. Janicot 

CE, 30 décembre 2024, Université Toulouse III Paul Sabatier, req. n°741753, concl. Merloz

 

Le Conseil d’Etat vient de rendre, à quinze jours d’intervalle, deux décisions intéressantes en matière d’abandon de poste.

 

Le premier arrêt, rendu le 18 décembre 2024 (CE, Association Le Cercle Lafay et autres, req. n°743640, à mentionner aux Tables) concerne, à propos des salariés, la procédure dite de “présomption de démission” introduite par la loi n°2022-1598 du 21 décembre 2022 portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi.

Cette loi, à l’article L.1237-1-1 du code du travail, a institué un dispositif de présomption de démission du salarié qui abandonne volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste dans le délai fixé par l’employeur.

Un recours a été formé devant le Conseil d’Etat dirigé notamment contre le décret d’application n°2023-275 du 17 avril 2023 sur la mise en œuvre de la présomption de démission en cas d’abandon de poste volontaire du salarié. La Haute Assemblée valide le décret en apportant certaines précisions.

En particulier, par une incise (“la seule circonstance que le décret en litige ne le précise pas n’est toutefois pas de nature à l’entacher d’illégalité…“), le Conseil d’Etat explicite une garantie qui selon les conclusions du rapporteur public, M. Janicot, découle de “l’économie générale du mécanisme de présomption de démission” et qui s’inspire de la jurisprudence administrative dégagée en matière d’abandon de poste dans la fonction publique (CE, Sect., 11 décembre 1998, req. n°147511 ; CE, 25 juin 2003, Office départemental HLM de la Haute Vienne, req. n°225347) : pour que la démission puisse être présumée, le salarié doit être “nécessairement” informé dans la mise en demeure des conséquences que pourrait avoir l’absence de reprise du travail sans motif légitime (point 7).

 

Le deuxième arrêt, plus classique dans son périmètre, concerne la procédure de radiation des cadres pour abandon de poste dans la fonction publique (CE, 20 décembre 2024, Université Toulon II Paul Sabatier, req. n°471753, à mentionner aux Tables).

Mécanisme radical d’éviction de la fonction publique, la radiation des cadres pour abandon de poste doit être précédée d’une mise en demeure. A cet égard, la décision du 30 décembre 2024 rappelle que la mise en demeure adressée à l’agent est une condition de fond, nécessaire pour que soit caractérisée une situation d’abandon de poste (CE, 26 septembre 2024, req. n°365918, mentionné aux Tables) et non une simple condition de procédure.

Mais elle ajoute qu”il n’en va pas de même de l’indication qui doit lui être donnée, dans la mise en demeure écrite qui lui est adressée, que l’abandon de poste pourra être constaté sans procédure disciplinaire préalable” (point 3). L’absence de cette information dans la mise en demeure est donc “danthonysable”, ce qui devra conduire le juge administratif à rechercher, si, dans les circonstances de l’espèce, l’agent a été privé d’une garantie par suite de cette irrégularité.

Qu’en sera-t-il dans le cas du salarié ayant abandonné son poste lorsque la mise en demeure prévue par l’article L.1237-1-1 du code du travail ne l’informera pas qu’à défaut d’avoir rejoint son travail il sera présumé avoir démissionné ? L’indication qui figure dans l’arrêt du 18 décembre 2024 concernant cette nécessaire information a été apportée, selon le rapporteur public, “pour éviter toute ambiguïté sur le contenu de la mise en demeure en question et la naissance de contentieux artificiels sur ce point devant le juge judiciaire“. La prudence recommande donc, dans l’intérêt des parties, de rédiger exhaustivement et précisément la mise en demeure…